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Impacts des lois 141 et 16 sur la copropriété divise

Fonds d’auto assurance, étude du fonds de prévoyance, carnet d’entretien… Quelles seront les conséquences de ces mesures sur vos finances?

Plus de fonds, plus de frais
Primes et franchises d’assurance exorbitantes
Conséquences si l’on ne se conforme pas
Conseils en prévision des changements à la loi

Vos frais de condo ont augmenté et vous vous demandez pourquoi? C’est probablement en raison des modifications apportées au droit de la copropriété divise par le biais de la loi 141, qui a été adoptée en 2018, et de la loi 16, adoptée en 2019. Apprenez-en plus à ce sujet dans cet article et découvrez quelles sont les conséquences.

Plus de fonds, plus de frais

Selon les modifications apportées par la loi 141, le syndicat de copropriété devra, à partir du 15 avril 2022, constituer un fonds d’auto assurance ayant la valeur de la franchise – la somme qui doit être assumée par l’assuré en cas de sinistre – la plus élevée parmi toutes les polices d’assurance souscrites par le syndicat. Le plus souvent, il s’agit de la franchise pour les dégâts d’eau. Le fonds est ainsi formé de manière à pouvoir couvrir les frais requis dans l’éventualité du désastre le plus grave qui est inclus au contrat d’assurance.

Quant à la loi 16, les changements qu’elle amène visent, entre autres choses, à renforcer l’entretien de l’immeuble, notamment en ce qui concerne la gestion du fonds de prévoyance, une somme mise de côté pour financer des travaux de rénovation ou de réparation majeurs aux parties communes (p. ex., remplacement des fenêtres). D’ici la fin de l’année 2021, le montant en question sera déterminé par une étude du fonds de prévoyance, à faire tous les 5 ans, avec l’aide d’un carnet d’entretien. Ce dernier document, qui identifie les travaux à faire et retrace l’historique du bâtiment et des améliorations, rénovations et réparations (en conservant notamment les plans techniques et les contrats d’entretien, de garantie, etc.) qui lui ont été apportées, deviendra obligatoire.

Primes et franchises d’assurance exorbitantes

Non seulement le syndicat devra mettre de côté un fonds d’auto assurance pour couvrir le montant de la franchise la plus importante, mais, en plus, la valeur de celle-ci ne cesse d’augmenter. En effet, les copropriétés ont déjà du mal à s’acquitter des contraintes de plus en plus exigeantes des assureurs. « Les montants des primes et des franchises connaissent une hausse vertigineuse, les protections sont de plus en plus limitées et, dans certains cas, les contrats ne sont tout simplement pas renouvelés », explique Me Yves Joli-Cœur, avocat, expert en droit de la copropriété et secrétaire général du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec (RGCQ).

Autrement dit, le syndicat de copropriété et les propriétaires de condo payent de plus en plus cher pour s’assurer, mais bénéficient de moins en moins de protections (p. ex., l’assureur peut refuser de couvrir les dégâts d’eau) pour ce prix plus élevé. C’est sans compter le fait que les primes et les franchises peuvent grimper en flèche, par exemple lorsqu’il y a plusieurs réclamations.

Pourquoi ces augmentations et ces contraintes à respecter?

Selon le Bureau d’assurance du Canada (BAC), elles sont dues à une hausse de la sinistralité. Cela est lié au fait que de nombreuses copropriétés sont en mauvais état, mal construites ou mal entretenues. Ainsi, les compagnies d’assurances, afin que leur activité soit rentable, sont forcées de resserrer la vis. « On vit une véritable crise en ce moment. Avant, il y avait onze assureurs au Québec, aujourd’hui, il n’en reste que six », déplore Me Yves Joli-Cœur.

En somme, le syndicat se retrouve avec peu ou pas de pouvoir de négociation avec les compagnies d’assurances. Il se voit obligé de percevoir des sommes importantes auprès des copropriétaires pour financer le fonds d’auto assurance. Les budgets annuels devront être ajustés à la hausse, d’où une augmentation des frais de condo qui risque d’être considérable.

Conséquences si l’on ne se conforme pas

Négliger le fonds de prévoyance

Me Yves Joli-Cœur craint que certains syndicats versent les sommes dues au fonds d’auto assurance au détriment du fonds de prévoyance, ce qui pourrait avoir pour conséquence, à court terme, de repousser indéfiniment les travaux prévus au carnet d’entretien et, à long terme, de mener à une détérioration de l’immeuble.

Une telle négligence pourrait non seulement diminuer la valeur de revente des condos (en raison de leur état), mais aussi nuire au syndicat de copropriété auprès de son assureur. Ce dernier peut demander à voir le carnet d’entretien et, s’il constate des lacunes, il est en droit d’exiger que les travaux soient faits dans un délai qu’il déterminera en fonction de leur ampleur et de leur urgence. « Aussi, explique Line Crevier, responsable du Centre d’information sur les assurances du BAC, l’assureur pourrait adapter les protections en fonction de l’état du bâtiment. Par exemple, si la toiture doit être refaite, l’assureur pourrait donner un délai plus long, mais retirer la protection d’infiltration d’eau par le toit ou les dommages causés par le vent ou la grêle à la toiture en attendant que la réfection soit complétée. »

Dans tous les cas, le syndicat devra aller puiser dans le portefeuille des copropriétaires, puisqu’il n’a pas mis d’argent de côté dans le fonds de prévoyance. Qui plus est, les primes et les franchises d’assurance risquent d’augmenter à la suite des travaux. Il y a un effet domino…

Documents non à jour

Avec la loi 16, le regroupement de copropriétaires doit remettre à tout acheteur potentiel les documents qui lui permettront de faire un choix éclairé. Cela inclut notamment l’étude du fonds de prévoyance et le carnet d’entretien. Si ceux-ci ne sont pas faits ou ne sont pas à jour, il pourrait devenir difficile de vendre les condos de l’immeuble concerné.

Copropriété non assurée

La loi oblige le syndicat à souscrire à une assurance, mais que se passe-t-il si aucun assureur ne veut couvrir l’immeuble? « Depuis un an, j’ai eu une dizaine de dossiers où des assureurs ont refusé d’assurer des immeubles », indique Me Yves Joli-Cœur. Et une copropriété sans assurance, ça veut dire que tous les copropriétaires deviennent en défaut vis-à-vis de leurs propres prêteurs hypothécaires; les gens sont propriétaires d’un condo, mais ils n’ont plus la possibilité de le vendre. « La banque ne prêtera pas à un futur acheteur si le bâtiment n’est pas assurable, explique l’avocat. Le pire, c’est qu’il n’y a rien à faire, sinon espérer trouver un autre assureur. Or, pas d’autre choix que d’aller sur un marché secondaire [c’est-à-dire hors Canada], notamment celui de Lloyd’s, à Londres. Il s’agit d’un marché où les primes et les franchises sont très élevées. »

Par ailleurs, soulignons qu’une copropriété non assurée signifie aussi que les administrateurs du syndicat ne sont plus protégés pour les erreurs et les omissions qu’ils pourraient commettre.

Conseils en prévision des changements à la loi

Au syndicat et à ses administrateurs

La vie en condo coûtera plus cher, mais vous pouvez prévoir le coup. « Soyez proactif et commencez dès maintenant – même si les dispositions qui touchent le fonds d’auto assurance et le fonds de prévoyance ne sont pas encore en vigueur – à redresser la situation en augmentant graduellement les cotisations. Vous éviterez ainsi que la marche soit trop haute quand vous serez obligé de vous conformer », recommande Johanne Dufour, directrice, Clientèles et communications, à la Chambre des notaires du Québec.

Aux copropriétaires ou futurs copropriétaires

Si vous avez un condo ou comptez en acheter un, Johanne Dufour, de la Chambre des notaires, vous conseille de vérifier :

  • La police d’assurance de la copropriété, en portant attention à la couverture, au montant souscrit, aux exclusions et à la valeur des franchises;
     
  • L’historique des réclamations des dernières années;
     
  • L’étude du fonds de prévoyance, pour savoir si le syndicat a déjà commencé à mettre de l’argent de côté (sinon, vous aurez sans doute à en payer le prix plus tard);
     
  • Le carnet d’entretien, pour savoir s’il est généralement respecté et s’il y a eu beaucoup de travaux par le passé (s’il y en a eu peu, mais que la copropriété est assez âgée, cela peut être un signe de négligence);
     
  • L’historique des travaux, si le carnet d’entretien – qui n’est pas encore obligatoire – n’est pas tenu.

Source : Protégez-vous

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